Title : Les fantômes du quartier des condamnés à mort
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Les fantômes du quartier des condamnés à mort
« La guillotine rend tout dérisoire.» - Robert Badinter, L'Exécution
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Les locaux de la Folie-Regnault, moins fréquentés que les abords de la Roquette un jour d'exécution, n'en furent pas moins visités à de nombreuses reprises et par toutes sortes de personnes. Par des hommes d'État, des missions étrangères venus se rendre compte de l'efficacité de la machine, ou par des visiteurs privilégiés que l'exécuteur avait l'obligation de recevoir, bien qu'il détestât ce genre d'exhibition. Car il se trouve des gens que la recherche du grand frisson conduisit à « toucher » les bois de justice, à demander au bourreau de l'essayer sur les traditionnelles bottes de paille qui servaient à tester l'affûtage du couperet. Lorsque la demande était officielle, il était obligé d'obtempérer. Mais il arriva que Maman Clarence, en son absence, propose une visite à l'intérieur de la remise, pour des inconnus de passage, aussi curieux d'émotions fortes que reconnaissants d'avoir été secrètement accueillis. Une jeune Anglaise, un jour, voulut se coucher sur la bascule et passer la tête sous la lunette. Accrochés au-dessus de sa tête, quarante kilos de bois, de fonte et d'acier en suspension...
Les locaux de la Folie-Regnault, moins fréquentés que les abords de la Roquette un jour d'exécution, n'en furent pas moins visités à de nombreuses reprises et par toutes sortes de personnes. Par des hommes d'État, des missions étrangères venus se rendre compte de l'efficacité de la machine, ou par des visiteurs privilégiés que l'exécuteur avait l'obligation de recevoir, bien qu'il détestât ce genre d'exhibition. Car il se trouve des gens que la recherche du grand frisson conduisit à « toucher » les bois de justice, à demander au bourreau de l'essayer sur les traditionnelles bottes de paille qui servaient à tester l'affûtage du couperet. Lorsque la demande était officielle, il était obligé d'obtempérer. Mais il arriva que Maman Clarence, en son absence, propose une visite à l'intérieur de la remise, pour des inconnus de passage, aussi curieux d'émotions fortes que reconnaissants d'avoir été secrètement accueillis. Une jeune Anglaise, un jour, voulut se coucher sur la bascule et passer la tête sous la lunette. Accrochés au-dessus de sa tête, quarante kilos de bois, de fonte et d'acier en suspension...
Il faut dire que la Veuve était impressionnante lorsqu'on l'avait dressée sur ses axes verticaux de quatre mètres cinquante, du haut desquels, à plus de vingt kilomètres à l'heure, la lame oblique dessinée par le docteur Louis tranchait une tête en deux centièmes de seconde ! Il existait deux guillotines : l'une, pesant cinq cent quatre-vingts kilos, ne servait qu'à Paris ; l'autre, plus légère et plus maniable, était transportée par voie de chemin de fer en province, et par deux fois elle passera les frontières.
Tel un jeu de construction, les aides du bourreau chargeaient dans le fourgon du père Mémi les éléments entreposés dans le hangar de la Folie-Regnault d'abord, puis de la Santé, pour les conduire sur le lieu de l'exécution. Chaque pièce était à sa place, comme sur un établi, marquée à la craie de sa silhouette encore innocente. La « notice » du docteur Louis, qui décrivait la guillotine par le menu pour en faciliter la construction et le montage, évoquait déjà la « machine à Deibler », à quelques détails près. De la Bastille à la Santé, elle était restée fidèle à la tradition républicaine. Elle était ainsi composée, depuis plus d'un siècle, « de deux montants parallèles, en bois de chêne, de la hauteur de dix pieds, joints en haut par une traverse, et montés solidement sur une robe avec des contrefiches de côté et par-derrière. Ces deux montants seront à un pied de distance et auront six pouces d'épaisseur. La face interne de ces montants aura une cannelure longitudinale, carrée, d'un pouce de profondeur, pour recevoir les oreillons d'un tranchoir. À la partie supérieure de chacun de ces montants, au-dessous de la traverse, et dans les épaisseurs, sera placée une poulie de cuivre. Le tranchoir, de bonne trempe, de la solidité des meilleurs couperets, fait par un habile taillandier, coupera par sa convexité. Cette lame tranchante aura huit pouces d'étendue traversable et six de hauteur. Le dos de cette lame coupante sera épais comme celui d'une hache. Sous ce dos seront, par le forgeron, pratiquées des ouvertures pour pouvoir, avec des cerceaux de fer, fixer sur ce dos un poids de trente livres et plus. Le tranchoir devant glisser de haut en bas dans les rainures des deux montants, son dos aura un pied de travers plus deux oreillons carrés, d'un pouce de saillie, pour entrer dans ces rainures. Une corde, assez forte, et d'une longueur suffisante, passera dans l'anneau et soutiendra le tranchoir, sous la traverse supérieure. Le billot de bois sur lequel doit être posé le col du patient aura huit pouces de haut et quatre pouces d'épaisseur... »
Depuis la Révolution, la machine dont se servait Anatole Deibler n'avait donc pas beaucoup changé. Son allure générale était la même, à l'exception de quelques perfectionnements notamment apportés par son père, dont la pose, de chaque côté du mouton, de roulettes destinées à l'accélération de la chute, et de ressorts disposés au bas des montants pour en amortir l'arrêt. Le bruit qui suit la libération du couperet dans les rainures de fer des montants verticaux, le son mat enfin, qui conclut le travail de la lame, rend « la mangeuse d'hommes » plus effrayante encore. Et le silence pesant qui règne après la chute du couteau, plus terrible que la mort elle-même.
Pour la monter, les aides du bourreau s'y prenaient une heure avant l'exécution, bien qu'il leur fallût moins de temps pour la dresser dans des conditions normales ; car tout s'emboîte, se visse ou se boulonne pour éviter le moindre bruit, le moindre indice qui puisse réveiller le condamné dans la cellule qu'il occupe, toujours à proximité du lieu de l'exécution. Ils commençaient par disposer sur le sol un croisillon d'appui en forme de T, puis ils dressaient les deux montants qu'ils étayaient par quatre jambes de force. À la Roquette, la structure reposait sur cinq dalles fichées dans le sol à demeure, à l'angle de la rue de la Croix-Faubin. Les deux montants, espacés de trente-sept centimètres, pèsent près de cent quarante kilos ; ils sont reliés par un linteau appelé « le chapeau », dans lequel prend place la pince qui retient le couteau surmonté par le mouton. En face des montants, les aides mettaient alors en place un bâti de bois sur lequel ils accrochaient la bascule, de la taille d'un homme. Une fois rabattue à la perpendiculaire du couteau, cette planche montée sur roulettes était poussée jusqu'aux montants, la tête du condamné reposant alors sur la partie inférieure de la lunette. La partie supérieure, qui est aussi en demi-lune, est fixée sur les montants verticaux, prête à s'abattre sur la nuque de celui qui était précipité sur la bascule.
Enfin, il ne faut pas omettre une troisième amélioration, plus fondamentale que les précédentes, et qui permettait à l'exécuteur d'accélérer le déclenchement du couperet. Celui-ci, vissé sur le mouton, est retenu par une flèche d'acier engagée dans une énorme pince, elle-même pressée par un système de ressorts. Il suffisait alors d'écarter ces ressorts au moyen d'une tringle pour que la pince s'ouvre aussitôt : la flèche, qui n'est plus maintenue, tombe alors avec le couperet. C'est ce qui explique l'usage des deux manettes utilisées par le bourreau qui constitue l'amélioration technique la plus notable qu'ait inventée le dernier Deibler. « L'une des deux manettes, un simple bouton, explique François Foucart, abat la partie mobile du carcan et ce casse-tête se rabat violemment sous l'effet des ressorts. Dans le meilleur des cas, le condamné est assommé. Frappé à la nuque, il s'imagine avoir été manqué par le couperet et tente de retirer sa tête, d'instinct. » L'effort ainsi fourni par le condamné est tel que la mort survient souvent en même temps que la chute du couteau. « Toute l'habileté du bourreau, insiste Foucart, consiste à manoeuvrer simultanément le bouton qui, lâchant un ressort, abat la partie supérieure du casse-tête, puis la poignée qui déclenche la chute du couperet. Cette poignée de cuivre, usée, patinée, ressemble au bec-de-cane d'une honnête épicerie de campagne... Ces deux gestes, en une seconde ou deux, c'était toute l'habileté d'Anatole Deibler. Trop tôt, c'est peut-être la tête mal engagée ; trop tard, c'est prolonger le supplice. »
Quand il avait pris ses fonctions, Anatole Deibler s'était fait un point d'honneur de les exercer dans les règles et selon les instructions nettes et précises données au bourreau. Un texte, rédigé à son intention, exigeait de lui qu'il s'y conformât, auquel cas, disait déjà le document du secrétaire perpétuel de l'Académie de chirurgie de Paris sous la Révolution : « S'il y avait quelques erreurs dans ces détails, elles seraient faciles à vérifier. » L'appareil devait être « essayé » après avoir été monté, puis le premier soin de l'exécuteur en chef était d'enlever la vis mobile qui arrêtait le ressort de la lunette. Ensuite, il agissait de la façon suivante, édictée point par point par les fonctionnaires du ministère de la Justice :
« Il prendra en main la grosse corde munie d'un anneau en forme de huit. Cet anneau doit être passé au crochet fixe du couperet. En tirant sur la corde, il montera le couperet jusque sous le chapiteau. Il constatera que le couperet n'est plus maintenu que par la double pince à ressort. Il écartera les deux cordes, la grosse, la petite, et les fera passer dans les deux crochets d'acier disposés à cet effet le long du montant gauche. Il placera le grand panier parallèlement à la plate-forme et immédiatement au-dessous du plan incliné. Il s'assurera que le seau de zinc, en forme de baignoire, est derrière l'appareil. Il disposera autour du seau le paravent en bois qui est destiné à contenir les jets de sang et les éclaboussures. Il relèvera la lunette en la prenant de la main droite par la poignée de fer. La guillotine est ainsi apprêtée... »
Extrait de : Anatole Deibler, l'homme qui trancha 400 têtes, Gérard A. Jaeger, Editions du Félin, 2001
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